Odessa Book Club
A l’occasion de JEM à l’Air d’Odessa, Isabelle Nemirovski fondatrice de l’association « Les amis d’Odessa » et auteur de Histoire, mémoires et représentations des Juifs d’Odessa nous fait l’honneur de nous ouvrir sa bibliothèque et nous livre une petite sélection de ses ouvrages préférés sur la culture juive odessite. Bonne lecture !
Alexandre Pouchkine, Eugène Onéguine, trad. du russe par Jean-Louis Backès, Paris, Gallimard, 1996.
Alexandre Pouchkine (1799-1837), reconnu comme le « Père de la poésie russe » fait entrer Odessa dans la littérature russe par son œuvre majeure, Eugène Onéguine, véritable panégyrique de la ville qui devient alors un mythe littéraire. Durant son séjour odessite (1821-1823) alors qu’il est condamné à l’exil par le tsar Alexandre Ier pour avoir composé quelques poèmes séditieux, Alexandre Pouchkine écrit le premier chapitre d’Eugène Onéguine dont le héros, un dandy, traîne son désœuvrement sur les routes de la Russie, depuis Moscou jusqu’à Odessa.
Cholem Aleïkhem, Menahem-Mendl, le rêveur (1910), trad. du yiddish par Léa et Marc Rittel, Paris, Rivages, 1993.
Cholem Aleïkhem – de son vrai nom Cholem Rabinovitch (1859-1916) – profite de son séjour à Odessa entre 1891 et 1893 pour écrire son ouvrage Menahem-Mendl, le rêveur. Il est acclamé par les critiques littéraires qui le qualifient de « Mark Twain juif ». Sous forme d’un échange de lettres entre Menahem-Mendl qui part provisoirement pour Odessa et son épouse, l’auteur narre avec humour et tendresse les tribulations malheureuses de ce doux rêveur.
Mendele Moïkher Sforim, Fichkè le boiteux, trad. du yiddish par Aby Wieviorka et Henri Raczymow dans Rachel Ertel, Royaumes juifs, Trésors de la littérature yiddish, Paris, Robert Laffont, 2008.
Mendele Moïkher Sforim (1836-1917), écrivain de langue hébraïque et éminent prosateur yiddish, est une figure incontournable du paysage littéraire juif odessite au seuil du XXe siècle. S’il sait ridiculiser en bon maskil, l’arriération, l’horizon borné et les mœurs provinciales du shtetl, dénonçant les abus des dirigeants communautaires, il voue une tendresse particulière au simple Juif à la foi inébranlable, au courage et à la simplicité exemplaires. Fichkè le boiteux est un précieux témoignage et une critique acerbe mais toujours drôle des mœurs de la société juive odessite de son temps.
Isaac Babel, Œuvres complètes, trad. du russe par Sophie Benech, Paris, Le Bruit du temps, 2011.
Isaac Babel (1894-1940) est un des premiers auteurs juifs d’expression russe. Il devient grâce à ses Contes d’Odessa le maître incontesté des lieux et des lettres juives odessites. Isaac Babel demeure dans le panthéon des arts et des lettres le conservateur du patrimoine de la ville et de ses mystères, le révélateur de son invisibilité, de tout ce qu’elle n’offre pas immédiatement au regard. Né dans le quartier juif de la Moldavanka, Isaac Babel apporte un témoignage vivant et très coloré sur la vie communautaire de ce quartier avec, entre autres, des représentations picaresques de ses bandits juifs et de leur chef Bénia Krik.
Haïm Nahman Bialik, Un voyage lointain, traduction en bilingue de son œuvre poétique par Ariane Bendavid, Stavit, 2004 et Le livre du feu et autres nouvelles, traduction de son œuvre en prose par Ariane Bendavid, Caractères, 2008.
Le poète, nouvelliste, essayiste, éditeur, traducteur, Haïm Nahman Bialik (1873-1934), figure de proue de la littérature hébraïque moderne et artisan de sa renaissance, est élevé dans l’orthodoxie par son grand-père à Jitomir en Ukraine mais s’y sentant confiné, tourne le dos à sa bourgade et élit domicile à Odessa en 1891. Il est très actif dans les cercles littéraires juifs odessites : dès 1901, on voit en lui le « poète de la renaissance nationale ».
Valentin Kataïev (1897-1986), Les Catacombes d’Odessa, trad. du russe par Esfir Bernstein et Olga Wormsber, Paris, Editeurs Français Réunis, 1956.
« Un vieux rêve intime » est une formule que j’ai empruntée à l’écrivain Valentin Kataïev, Juif d’Odessa, pour donner son sous-titre à mon ouvrage : « Histoire, mémoires et représentations des Juifs d’Odessa. Un vieux rêve intime » (Honoré Champion, mai 2022). Elle correspond aux premiers mots de son roman Les Catacombes : « C’était un vieux rêve intime de Pétia : faire un voyage à deux. » L’enfant n’a qu’un seul désir : partir avec son père pour Odessa. On lit déjà dans cette phrase inaugurale l’amour d’un auteur pour sa cité natale au point de lui donner un rôle central dans son œuvre. En outre, il est loin d’être le seul homme de lettres originaire des lieux à se saisir de sa plume pour mettre en mots la rêverie odessite.