Naomi Ragen : la « Rosa Parks » israélienne
Journaliste et dramaturge israéloaméricaine, Naomi Ragen compte parmi les auteurs les plus populaires en Israël. Une grande partie de son œuvre se déroule dans le milieu ultraorthodoxe dont elle en dénonce les dérives subies par les femmes. Son oeuvre sera présentée lors de la traditionnelle conférence-débat de clôture de la 35e Journée de la Culture et du Livre Juifs, Dimanche 1er Décembre dès 12h00 au centre Beaugrenelle.
Naomi Ragen voit le jour en 1949 à Brookyn dans une famille juive peu pratiquante « nous allions à la plage à shabbath ! », s’amuse-t-elle. Sa mère est née aux États-Unis d’immigrants juifs polonais et son père, Louis Terlinsky, a vécu en Ukraine les toute premières années de sa vie avant de rejoindre l’Amérique. Naomi perd son père à l’âge de six ans. Sa mère décide de l’envoyer dans une école juive privée orthodoxe, le Hebrew Institute de Long Island, pour lui assurer la meilleure éducation possible.
Cette école respecte les pratiques de ses élèves et se montre plutôt souple dans l’éducation religieuse qu’elle dispense aux enfants. Jeune adolescente, au contact de camarades observantes, Naomi traverse une crise religieuse et se tourne, à son tour, vers une pratique orthodoxe, convaincue, raconte-t-elle, que c’est ce que Dieu attend d’elle. La jeune fille poursuit ses études, à la City University de New York, en étudiant la littérature anglaise, la philosophie et l’histoire.
A l’âge de 19 ans, elle rencontre Alex, un étudiant en mathématiques – Juif pratiquant comme elle – avec lequel elle se marie, et trois ans plus tard, le couple s’installe en Israël. Un choix idéologique : « Quand j’ai déménagé en Israël, mon rêve est devenu mon adresse », confie-t-elle dans une interview à Tribune Juive en 2021. « Nous avions fait ce choix indépendamment l’un de l’autre, bien avant de nous rencontrer. Le mien était le résultat d’une adhésion croissante au judaïsme orthodoxe. J’ai pris littéralement l’ordre de Dieu à Abraham :“Quittez votre patrie, votre lieu de naissance et la maison de votre père, et allez dans le pays que je vous montrerai“. Pour être une Juive religieuse, je devais aller jusqu’au bout. Je ne me voyais pas faire cela en Amérique, où je me sentirais toujours comme une étrangère. »
Installée à Petach Tikva, puis à Jérusalem, Naomi Ragen consacre alors son temps à ses quatre enfants ainsi qu’à l’écriture (jusqu’en 2015) d’une chronique de société très suivie dans le Jerusalem Post. En 1978, elle complète son cursus universitaire par un Master en littérature anglaise à l’Université Hébraïque de Jérusalem.
“Quand j’ai déménagé en Israël, mon rêve est devenu mon adresse”
A l’âge de 19 ans, elle rencontre Alex, un étudiant en mathématiques – Juif pratiquant comme elle – avec lequel elle se marie, et trois ans plus tard, le couple s’installe en Israël. Un choix idéologique : « Quand j’ai déménagé en Israël, mon rêve est devenu mon adresse », confie-t-elle dans une interview à Tribune Juive en 2021. « Nous avions fait ce choix indépendamment l’un de l’autre, bien avant de nous rencontrer. Le mien était le résultat d’une adhésion croissante au judaïsme orthodoxe. J’ai pris littéralement l’ordre de Dieu à Abraham :“Quittez votre patrie, votre lieu de naissance et la maison de votre père, et allez dans le pays que je vous montrerai“. Pour être une Juive religieuse, je devais aller jusqu’au bout. Je ne me voyais pas faire cela en Amérique, où je me sentirais toujours comme une étrangère. »
Installée à Petach Tikva, puis à Jérusalem, Naomi Ragen consacre alors son temps à ses quatre enfants ainsi qu’à l’écriture (jusqu’en 2015) d’une chronique de société très suivie dans le Jerusalem Post. En 1978, elle complète son cursus universitaire par un Master en littérature anglaise à l’Université Hébraïque de Jérusalem.
Féministe engagée
Naomi Ragen reçoit alors des centaines de lettres de femmes qui l’encouragent, lui demandent des conseils et lui apportent leur témoignage. En 1992, son deuxième roman, Sotah (prix Wizo), inspiré d’une histoire vraie, obtient un large succès avec plus de 200 000 exemplaires vendus aux États-Unis et en Israël. Sotah reste en tête des ventes israéliennes pendant plus de 92 semaines consécutives.
Elle y raconte l’histoire d’une jeune femme juive orthodoxe, accusée d’adultère par une brigade des mœurs illégale qui l’oblige à s’exiler aux États-Unis. Le 27 mars 2002, Naomi Ragen et sa famille réchappent au terrible attentat survenu lors du seder de Pessah au Park Hotel de Netanya qui causa la mort de trente personnes et en blessa cent quarante-trois autres. De cette expérience traumatisante, naît, trois ans plus tard The Covenant (Le Serment, traduit en français en 2013) autour de l’enlèvement d’un père et de sa petite fille par des terroristes du Hamas.
Après un roman historique sur l’Inquisition (Le fantôme de Dona Gracia Mendes), paraît, en 2012, Le silence de Tamar, où la jeune épouse d’un rabbin de Brooklyn découvre qu’elle est enceinte après avoir été victime d’un viol et s’interroge anxieusement sur la paternité du futur bébé. Par crainte des réactions de son mari et de sa communauté, Tamar préfère garder le silence.
Son quatrième roman, traduit en français en 2016, Les sœurs Weiss, met en scène deux sœurs, nées au sein d’une famille ultra-orthodoxe de Brooklyn dans les années 50 : Pearl se conformera aux traditions ancestrales tandis que Rose, éprise de liberté, décide de s’en affranchir pour maîtriser son destin. Depuis, elle a écrit huit autres romans, certains non traduits en français, le plus récent en septembre 2023, The Enemy Beside Me,qui conduit le lecteur sur les traces d’un criminel nazi. Naomi Ragen est aussi l’auteur d’une pièce de théâtre Women’s Minyan, commandée en 2001 par le théâtre national israélien Habima de Tel Aviv, jouée plus de 600 fois en Israël, en Argentine et aux Etats-Unis : elle y dénonce la violence conjugale au sein du monde haredi.
La "Rosa Parks" israélienne
Autre cheval de bataille de Naomi Ragen, la lutte contre la séparation des hommes et des femmes, imposée par les plus radicaux dans les bus des quartiers ultra-orthodoxes de Jérusalem. Elle a porté l’affaire jusqu’à la Haute Cour de justice qui, en 2011, a déclaré illégale cette ségrégation. Une action qui lui a valu le surnom de « Rosa Parks israélienne » dans la presse internationale.
Lauréate du Prix de l’État d’Israël
Elle publie désormais régulièrement des articles sur son blog naomiragen.com qui compte des milliers d’abonnés. La traduction de ses romans en hébreu, à partir de 1995, a placé Naomi Ragen au rang des écrivains les plus populaires en Israël.
En septembre 2000, elle fait partie de la délégation israélienne à la Conférence internationale du Conseil de l’Europe sur les droits des femmes et reçoit en 2002, le prestigieux Prix de l’État d’Israël des mains de son Président pour sa contribution à la littérature israélienne.