‘Hanouka 5785 : Maï ‘Hanouka ?
מאי חנוכה?
Maï ‘Hanouka ?
Qu’est-ce que ‘Hanouka? La question est presque devenue rituelle depuis qu’elle a été soulevée pour la première fois au milieu d’un daf de Talmud (Chabbat 21b)
'Hanouka est une histoire de miracle. Mais de quel miracle parle-t-on ?
Tout dépend à qui l’on pose la question !
Il y a l’histoire de cette petite fiole d’huile, suffisante en apparence pour alimenter la ménorah du Temple pendant une seule journée, mais qui, par miracle, dura les huit jours nécessaires à la production d’une huile consacrée.
D’autres évoqueront le miracle de la résistance du peuple juif face à la tentation de l’assimilation et à l’oppression de la puissance occupante. Le mot miracle prend ici tout son sens hébraïque. נס (nes), souvent traduit par miracle, signifie également étendard. Et effectivement, il n’existe pas de plus véritable étendard que la résilience de l’âme juive et son attachement à ses racines, son histoire, sa tradition. À travers cet étendard, ‘Hanouka dépasse le miraculeux purement transcendantal et replace l’Humanité comme participante active dans la création de conditions extraordinaires. Ces conditions permettent non seulement de sauver nos vies, mais aussi de les illuminer d’espoir et de persévérance.
'Hanouka est aussi, et surtout, la fête des lumières.
Pas la lumière telle qu’elle est mentionnée dans le récit de la Création. Non. Hanouka parle d’une autre lumière : celle qui naît de notre intention et se concrétise par nos actions, chaque soir pendant huit nuits consécutives. Jour après jour, en nous renforçant dans notre détermination à accomplir cette mitzvah, nous voyons cette lumière se démultiplier.
La lumière devient une métaphore de la Torah et de notre judéité, une richesse qui s’accroît lorsqu’elle est partagée et célébrée avec autrui, à l’image de la flamme du chamach qui, chaque soir, allume une bougie supplémentaire. Ainsi, petit à petit, nous dissipons les ténèbres et l’obscurité.
En regardant vaciller la flamme de nos bougies de Hanouka, une question s’impose : que vient mettre en lumière ‘Hanouka ?
‘Hanouka met en exergue le fait que nos actions ont des conséquences : sans elles, pas de mitsva, pas de lumière. Lutter contre l’obscurantisme semble être un combat jamais gagné de manière définitive, à l’image de nos bougies qui s’éteignent inéluctablement. Mais choisir, chaque soir, de recommencer, est la plus forte et la plus belle raison pour laquelle ce combat ne sera jamais définitivement perdu.
Comme l’enseignent les Pirkei Avot (2:16) :
.לא עליך המלאכה לגמר, ולא אתה בן חורין לבטל ממנה
« Il ne t’incombe pas de finir le travail, mais tu n’es pas libre pour autant de t’y soustraire. »
Les lumières de nos hanoukiot nous rappellent l’importance d’être une lumière parmi les nations et l’absolue nécessité que toutes les étincelles de génie juif puissent être perçues à leur juste valeur : celle de l’égalité.
Ainsi nous enseigne le Talmud (Shabbat 23a) :
.נשים חייבות בנר חנוכה שאף הן היו באותו הנס
« Les femmes sont obligées d’allumer la lumière de Hanouka, car elles aussi ont été incluses dans ce miracle. »
אף הן. Elles aussi. Elles aussi ont fait partie du miracle. Elles aussi font partie du peuple juif, de nos communautés, de nos célébrations, de nos minyanim. Elles aussi ont une lumière qu’il est impératif de protéger et de faire briller, plutôt que de chercher à l’éteindre.
'Hanouka, une invitation à partager cette lumière d’espoir si fondamentale à notre judaïsme.
Le commandement n’était pas seulement d’allumer la ‘hanoukia, mais de la rendre visible aux yeux de toutes et tous : פרסומי ניסא (Pirsoumei Nissa), rendre public le miracle de ‘Hanouka. Positionner sa hanoukia devant la fenêtre nous pousse à afficher publiquement et fièrement le miracle qu’est la résistance du peuple juif face aux épreuves, tout en réaffirmant l’importance de nos valeurs.
Car il n’existe pas de plus grande preuve de résilience que de partager la joie de célébrer notre tradition, incarnée à ce moment précis dans les bougies de nos hanoukiot. Alors oui, il arrive des années, comme peut-être celle que nous traversons, où, face à la montée de l’antisémitisme, à une guerre persistante aux conséquences toujours plus terrifiantes, et aux épreuves personnelles que nous rencontrons, la joie, la lumière et le réconfort de ‘Hanouka semblent hors de portée. C’est pourquoi la Torah enseigne (Ex24:7) : נעשה ונשמע, « fais et tu comprendras ». C’est précisément dans ces moments-là que nous avons le plus besoin de la lumière de Hanouka et des instants de miracles éphémères que nous pouvons créer pour nous-mêmes et pour les autres. En allumant nos ‘hanoukiot, nous ravivons cette lumière, cet espoir et cette espérance dont nous avons tant besoin.