Chavouot 5783 : Book Club
Pour préparer Chavouot 5783 et le don de la Torah, le rabbin Yann Boissière nous fait le plaisir de nous partager ses ouvrages favoris autour de la fête de Chavouot. Bonne lecture !
- Josy Eisenberg, Adin Steinsalz, Le chandelier d’or, Editions verdier, 1988
Qui n’a pas fait son miel de ces conversations érudites, inspirantes et pleines d’humour avec l’un des plus grands Sages du 20ème siècle ? Le livre, en fait, traite de toutes les fêtes du calendrier, et en plusieurs conversations pour chacune, traitent de leurs aspects cultuels les plus simples, jusqu’à des enseignements de kabbale rendus parfaitement comestibles par le génie d’Adin Steinsalz… Des trésors pour toute l’année.
- Jonathan Sacks, Ceremony and Celebration. Introduction to the Holidays, Maggid Books, Milford, USA, Jerusalem, 2017
Je vais vous faire une confidence : il n’est pas une paracha de l’année où je ne regarde, avant d’imaginer mon propre commentaire, celui de Jonathan Sacks. Tout simplement parce qu’il fut philosophe avant d’être rabbin, et que son approche, qui a également le mérite de puiser à des auteurs anglo-saxons assez peu connus en France, s’appliquent à confronter les sources, que l’on dit « profanes », avec nos sources juives. Le résultat produit un effet qui est au cœur de l’approche libérale (« libéral » qu’il n’était absolument pas – personne n’est parfait…) : la résonnance actuelle d’un sagesse éternelle. Ce recueil, ici, n’est pas celui des 54 parashiyot de la Torah, mais sa synthèse de chaque fête. Celle sur Chavouot s’intitule « the Greatest Gift », le « Grand Don » — une promesse non usurpée…
- Franz Kafka, Le procès (trad. de l’all. par Bernard Lortholary), Paris, Gallimard, 1985.
C’est dans l’avant-dernier chapitre du roman qu’apparaît l’un des passages les plus connus de Kafka, un des rares textes qu’il a d’ailleurs publié de manière indépendante : la parabole « Vor dem Gesetz » (« Devant la Loi »), et qui se trouvait être l’un de ses écrits préférés. Introduit dans le roman comme une histoire racontée par l’abbé de la cathédrale au héros, K., elle commence de manière énigmatique : « Une sentinelle se tient postée devant la Loi ; un homme vient un jour la trouver et lui demande la permission de pénétrer. Mais la sentinelle lui dit qu’elle ne peut pas le laisser entrer en ce moment. L’homme ce réfléchit et demande alors s’il pourra entrer plus tard. ‘’C’est possible, dit la sentinelle, mais pas maintenant.« … La suite est à la hauteur du génie de Kafka : impossible, nécessaire, époustouflante… et terrible. Peut-être l’une des plus belle méditations sur ce que signifie la loi – sur nos démissions, et nos illusions à son égard !
- Michael Walzer, Dans l’ombre de Dieu. La politique et la Bible, Bayard Editions, Paris, 2016
La Loi, c’est aussi une inspiration politique. On découvre, d’ailleurs, à l’encontre de tous ceux qui pensent que le judaïsme n’a pas de pensée politique, que la Bible est aussi un grand livre politique. Tyrannie, libération, naissance de la royauté, co-existence étonnante de trois codes de loi (issus de cultures différentes, mais toutes placées dans la bouche de Dieu comme s’il les endossaient placidement malgré leur caractère contradictoire), ce livre trace des perspectives absolument novatrices et claires sur les différentes conceptions de la loi, du gouvernement, du pouvoir royal, des institutions politiques selon la vision hébraïque. Oui, comme le dit le Midrach, chaque jour sort une voix nouvelle du Mont Sinaï !
- Yann Boissière, Eloge de la Loi, Editions du Cerf, 2017
Oserais-je recommander l’ouvrage de votre humble serviteur… ? La base de mon interrogation : alors que notre temps sacralise la liberté, dénie l’autorité et récuse la norme, ne doit-on voir dans la loi qu’un vestige d’un passé révolu où dominaient l’obligation, la coercition et la répression ? Ou faut-il concevoir au contraire que la soumission à la règle peut être synonyme d’émancipation de l’esprit ? Et si oui, à quelles conditions ? De Moïse à Levinas en passant par Spinoza, il y a du grain à moudre, sachant que « Im eïn Qema’h, eïn Torah », « S’il n’y a pas de grain, il n’ a pas de Torah ! »